vendredi 25 mai 2012

POKER BY PMU : Entretien avec Stéphane Auffret, Responsable Poker de PMU


Responsable poker pour ce Groupement d’Intérêt Economique (GIE) qui regroupe 50 sociétés de courses, Stéphane Auffret, Responsable de la branche poker depuis 2010 a accepté de me recevoir pour nous dévoiler la vision de son entreprise sur le marché du poker en ligne.


Il baigne dans ce marché du jeu depuis 2001, année où il intègre l’entreprise pour prendre la direction des Etudes Marketing et de la Veille concurrentielle après avoir fait ses armes chez TNS Sofres.

soxav : Comment fait-on passer le PMU du turf au bluff ?

Stéphane AUFFRET : Pendant 9 ans, j’ai été en charge des études marketing et de la veille concurrentielle au PMU. Une de mes missions consistait donc à surveiller le marché des jeux on line sur les 3 segments majeurs hors casino à savoir les paris sportifs, les paris hippiques et le poker. L’objectif était de produire de l’information sur ces différents segments (forces en présence, stratégie marketing et de communication, techniques de fidélisation et de recrutement…) car nous pensions que l’ouverture du marché des jeux on line était plus que probable à terme et que dans ce contexte notre entreprise ne pourrait rester mono-activité. Une fois que cette ouverture a été confirmée, ma mission consistait à fournir tous les éléments nécessaires à la prise de décision d’y aller ou pas : évaluation du marché français, stratégie d’entrée pour le PMU, sélection des partenaires potentiels, business plan…   

Mais autant l’extension vers les paris sportifs s’est imposée assez naturellement et rapidement autant pour le poker des questions de cohérence, de légitimité et d’image se sont posées car l’image du poker reste encore très clivée en fonction de l’âge. Notre Président a convaincu le Board de la nécessité d’y aller avec une démarche défensive dans un premier temps.   

En effet, l’ambition du PMU est d’être le leader du pari en ligne multisport et multicanal. Disposer d’une offre globale permettant d’atteindre cet objectif plus facilement et d’éviter que nos clients aillent s’intéresser au poker chez d’autres opérateurs faisant partie de notre stratégie, le poker est apparu comme une bonne activité de complément. Une fois cette décision prise, il ne restait qu’à choisir le partenaire et être prêt le premier jour de l’ouverture du marché pour créer un effet de surprise.

soxav : Les résultats décevants des paris sportifs, malgré notamment la Coupe du Monde du Football en Afrique du Sud, ont-ils ouvert une brèche plus grande au poker ?

S. A. : On dit que le marché du pari sportif est décevant, mais il ne l’est pas pour tout le monde. Il y a des acteurs qui gagnent des parts de marché, et des acteurs qui dégringolent. Nous faisons partie des acteurs qui gagnons des parts de marché dans les paris sportifs (ndlr : x2 en 2011). Certes il y a une fiscalité et un cadre difficiles pour rentabiliser l’activité. Mais très vite, les chiffres sont au rendez-vous, au-delà même de nos espérances dans un premier temps. Notre président, Philippe GERMOND, prend acte de ce départ de trois-quatre mois significatifs, et donc nous demande d’évaluer le déploiement d’une stratégie un peu plus offensive. On leur avait promis que le marché allait être costaud, et bien c’était le cas ! Le poker s’est imposé alors de lui-même, pas par comparaison avec les autres segments du marché.

C’est à partir d’octobre 2010 que l’on a commencé à franchir une première étape : on communique plus, la Team Poker est créée. Et puis le premier semestre de l’année 2011 se passe, les résultats sont encore au rendez-vous. On nous demande alors en avril 2011 d’envisager un plan plus soutenu d’investissement et de communication. Nous l’avons fait et à partir de Septembre 2011, nous avons commencé à communiquer en télé, avec un plan média hyper ciblé.

En résumé, nous avons de l’ambition mais PMU ne sera jamais un pure player, on ne va jamais se tromper, se fourvoyer là-dedans. En revanche nous avons de vraies ambitions pour PMU Poker : s’installer durablement comme premier des généralistes, asseoir notre part de marché actuelle et la développer avec un objectif de doublement dans les 5 ans qui viennent.

soxav : Pourquoi et comment monte-t-on une Team pro ?

S. A. : La Team Pro est un instrument de visibilité, de notoriété et de légitimité dans le milieu du poker et le PMU a besoin de cette légitimité. Nous avons une clientèle qui comporte des jeunes, mais la majorité de nos clients ont entre 35 et 49 ans. Il était donc primordial de ne pas lui donner un profil trop décalé de joueurs. Notre clientèle doit pouvoir s’identifier à des personnes de la même tranche d’âge, ayant réussi leurs vies avant le poker. Il nous fallait d’abord quelqu’un de très connu dans le milieu du poker, doté d’un fort charisme. Guillaume Darcourt correspond parfaitement, il sait attirer la lumière. Il nous fallait aussi des joueurs qui puissent faire le pan avec les activités hippique et sportive parce que nous travaillons en cross-sell sur des gens qui sont multi activités. Donc quelqu’un qui puisse parler turf et poker, quelqu’un qui puisse parler sport et poker. Résultat : Jean-Philippe Rohr, ancien international et médaillé d’or et Philippe Ktorza, ancien turfiste et propriétaire de chevaux à Vincennes. Et enfin, la touche féminine pour équilibrer tout ça [ndlr : Rebecca Gerin]. Cette équipe s’est construite autour de ces valeurs-là, de ce positionnement-là.

Mais, il nous fallait aussi représenter la communauté online des jeunes grinders qui arrivent sur PMU au fur et à mesure de nos communications et du développement de nouvelles techniques comme l’affiliation. Le Team s’est agrandie avec Emile Petit, qui a une aura très forte dans la communauté des joueurs online et est en plus un de nos clients. Clément ‘OhMyGuru’ Beauvois avait, lui, eu un certain nombre de résultats sur des tournois online, même si ce n’était pas forcément sur PMU.fr. Ils sont l’image du joueur online parce qu’ils sont en permanence sur la salle. Nos livetards, certes, jouent aussi et animent, mais ils ont un circuit de tournois physiques qui leur prend beaucoup de temps et ne leur permet pas d’être tous les soirs sur la room.

soxav : Le marché du poker est très dynamique mais la fiscalité fait grincer les dents des opérateurs, tout comme des joueurs récemment. Comment  défend-on un modèle économique viable auprès de l’institution politique ?

S. A. : Déjà,  nous n’avons en aucun cas un privilège en étant ancien monopole, au contraire puisque nous payons la TVA contrairement à d’autres opérateurs. Personne ne gagne d’argent actuellement, y compris le PMU, ceux qui disent le contraire font de la communication. Il faudrait certainement revoir et assouplir cette fiscalité, mais ne faisons pas de plan sur la comète. En revanche, optimiser les dépenses marketing, les dépenses de communication média, travailler le retour sur investissement, c’est aussi fait pour travailler la rentabilité. Et à court terme, ce n’est absolument pas la fiscalité qui fera que les entreprises deviennent rentables du jour au lendemain, mais plutôt l’équilibre de leurs dépenses marketing, quand elles arrêteront de surenchérir pour prendre des positions sur le marché.. Dire maintenant que l’on n’est pas rentable ? Il faut m’expliquer dans quel marché de conquête pour prendre de la part de marché, c’est rentable ? Cela n’existe pas.

La fiscalité sur les gros joueurs est également un dossier majeur. Sur des marchés où un petit nombre de joueurs génèrent un gros revenu, notamment chez les mastodontes du secteur, les plus affectés seront encore les acteurs franco-français qui ne peuvent se rattraper sur les marchés internationaux. Quand l’Autorité de Régulation des Jeux en Ligne (ARJEL)  nous consulte, nous donnons notre avis, fondé sur ce que l’on observe et ce que l’on connait du marché. Nous avons alerté sur cette  double frappe fiscale sur les enjeux et sur les gains, sur cette forme d’incitation à l’exil, sans compter ceux qui se sont déjà expatriés ou qui jouent sur vpn en .com, et de l’impact sur la ressource fiscale de l’état.

soxav : Dans ce contexte, comment se positionne PMU Poker sur l’international ?

S. A. : Sur la question du jeu entre marchés régulés, nous y avons pensé en amont car ils vont permettre de fusionner certainement à terme des liquidités sur les tournois. C’est pour cela aussi que nous avons choisi Party Gaming comme partenaire car sa stratégie était bien de pénétrer tous les marchés régulés en Europe. En Cash Game c’est beaucoup plus compliqué, la taxe étant prélevé sur chaque pot. En revanche, notre développement international en B to C se concentre essentiellement sur le pari hippique. A ce stade et à courte terme, pas de développement de PMUPOKER, ou des paris sportifs, au niveau international. Nous n’avons pas non plus d’ambitions de proposer une offre sur le marché américain.

soxav : La technologie PartyGaming justement : quelles vont être les incidences du rapprochement Bwin/Party ?

S. A. : Dans notre relation contractuelle, nous avions prévu le cas d’une fusion avec d’autres opérateurs du secteur, nous avons été consultés, leurs patrons sont venus nous voir pour nous parler du projet, du moins au niveau de la France. Nous avions en amont évalué une stratégie basée sur une technologie en propre, mais le poker en ligne est un marché de volume qui nécessite une plateforme stable, rôdée, un bon écosystème (fish, shark, grinder) et une bonne liquidité. Sans cela, même avec le plus beau logiciel du monde, cela ne marchera pas. Se lancer dans la construction d’un logiciel de poker sans avoir d’expérience du poker en ligne nous paraissait être une erreur stratégique.

Cela se passe aujourd’hui plutôt très bien. En tant que premier contributeur de ce réseau sur la France, PMU Poker a permis à PartyGaming de pénétrer le marché français et d’y occuper tout de suite une position de taille. Cela a contribué au choix de la nouvelle entité Bwin Party de conserver la plateforme PartyGaming. De notre côté, il était hors de question de changer de plateforme avec  des risques de pertes extrêmement puissants, tant l’accompagnement d’un tel changement est extrêmement difficile.

Nous mettons aussi la pression sur notre partenaire sur le poker dit « mobile » et bien sûr une version PMUPOKER est à l’étude. J’ai bon espoir pour que le Q4 2012 nous permette d’annoncer cette extension d’accès au service : smartphones, tablettes (et mac sur lequel nous ne sommes pas présent). Surtout que nous sommes très en pointe là-dessus pour le sport et le hippisme.

soxav : Quelle position adoptez-vous par rapport aux communautés de joueurs ? Comment faites-vous aujourd’hui pour continuer à recruter des joueurs, notamment depuis la limitation des bonus en janvier 2012 ?

S. A. : L’affiliation tout d’abord avec une stratégie ciblée, sélective et fondée sur le partage de revenus. Il y a un enjeu de valeur derrière, comme je vous l’ai dit, nous devons compléter notre clientèle, et cette technique d’affiliation permet d’aller travailler cette clientèle dite de regs puisqu’elle contribue à légitimer notre marque dans l’univers des communautés, à faire vivre la liquidité de la room. Il n’est pas question d’aller débaucher des joueurs 100% Winamax ou Pokerstars mais si on peut gratter 20% de leurs enjeux, c’est déjà gagné. On veut dire aux communautés que l’on existe, que nous avons des avantages, un bon écosystème, que la liquidité du réseau va encore s’accroître, même si nous ne faisons pas du rakeback à 65% comme d’autres sites, sur lesquels certains joueurs sont désormais plus payés pour jouer que  clients.

Sur l’offre de bienvenu, nous étions à 200€ et sommes passés à 500€ comme la totalité des opérateurs, sans répercussion sur notre volume de jeu. Ce qu’il faut regarder, ce sont les conditions d’obtention de ces bonus, il faut jouer en Cash Game avec un aspect anti-productif pour le nouveau joueur qui découvre les conditions d’éligibilité. Pour le joueur de SnG / tournoi, nous avons adossé 15€ sans condition autre que d’ouvrir un compte et renvoyer ses papiers pour le confirmer. Ne nous mentons pas, le Cash Game est très important économiquement, mais en même temps, il n’y a rien de pire pour l’attrition, le fameux churn au poker qui est très élevé, car selon la clientèle, l’expérience de jeu peut être négative.

soxav : Stéphane Auffret, merci de m’avoir reçu, et de nous avoir fait partager la vision du marché de PMU Poker. Transmettez mes félicitations à P. Ktorza pour sa formidable performance au WPT World Championship au Bellagio !

vendredi 18 mai 2012

LA PUB SE MET AU POKER : Bank of Poker/Charliepoker : 0-0

Mi-avril, fort d’un buzz savamment orchestré ou bénévolement relayé par la quasi-totalité des forums et communautés de poker, Bank of Poker.com annonçait une « Révolution du poker ». Branle-bas de combat chez Barrière Poker et réunion de crise chez Pokerstars monde ? Soupe populaire pour Winamax et Polemploi chez Microgaming ? Car la promesse interpelle : jouer au poker gratuitement et gagner de l’argent sonnant et trébuchant. Un mois après cette annonce, chimère et fausse bonne idée ou véritable révolution en marche ?



L’idée est vieille comme le monde ou presque, les publicitaires financent le fonctionnement du site et les dotations des internautes en échange de la disponibilité de cerveaux offerte. Les annonceurs paient pour sponsoriser un tournoi, diffuser une publicité avant le lancement du SnG ou après 30 mn de jeu, … En contrepartie, une partie de la somme payée par cet annonceur est reversée en prizepool pour les joueurs. Lancée en avril 2012, Bank of Poker affiche son ambition dès sa Home Page. "Révolutionner le poker sur internet", rien que cela, pour ce « premier site de poker gratuit au monde à proposer de façon permanente des tournois gratuits de 9 à 5000 joueurs avec des dotations jusqu’à 5000€ et plus », comme il se décrit en Homepage du site.

Passons outre l’extraordinaire performance marketing qui rend possible des dotations jusqu’à 5000€, donc sous-entendue somme maximale, tout en ajoutant « et plus », donc sous-entendue somme ... pas maximale. Autre arrangement marketing, l’aspect pionnier qui oublie le lancement quelques semaines auparavant de Charliepoker, sur le modèle « Le premier site de poker entièrement gratuit vous donnant des gains d’argent réel, vous permettant de jouer aux tournois quand vous voulez. » Cela vous rappelle quelquechose ?
Si les deux opérateurs affichent tous deux une version bêta de leur interface, Bank of Poker est accessible en Flash sur PC et Mac, tandis que Charliepoker vous invite à télécharger son logiciel à l’instar des vrais sites de poker en ligne. En revanche, n’envisagez pas de faire du volume puisque le monotabling est de rigueur dans les deux cas. N’espérez pas non plus jouer des milliers de mains, l’interface de Charliepoker est franchement lente, mais fait figure de bolide face à la version arthritique de Bank of Poker pour octogénaire rhumatisant. L'annonce ces derniers jours d'une nouvelle version 2.0, toujours bêta, sensée corriger les bugs, améliorer le gameplay et présenter une nouvelle ergonomie (comprendre : refonte graphique des boutons) en dit long sur la préparation de ce lancement. Cerise sur le gâteau, non seulement Bank of Poker plante régulièrement mais il n’est ensuite pas toujours possible en rouvrant l’application de reprendre sa place, ni d’ouvrir un nouveau SnG puisque vous êtes en train de jouer sur une table … à laquelle vous ne pouvez plus accéder. Imparable !
Différence de taille enfin pour le jeu, Bank of Poker ne propose que du SnG/Tournoi tandis que Charliepoker a choisi le Cash Game.
Le modèle économique de ces deux intervenants d’un genre nouveau est bien entendu légal puisque les joueurs ne parient pas d’argent. Sur Charliepoker, la simple connexion quotidienne vous crédite de 50.000$ (virtuels bien sûr) pour jouer sur des tables 6-handed 10/20 avec pour objectif de faire partie des 100 premiers au 01 juillet 2012 qui se partageront les 15.000€ (bien réels cette fois) du tournoi de lancement de la room. En attendant les 10 meilleures progressions quotidiennes sont récompensées de 5€ cash. Pas de publicité à la table, on joue comme sur les rooms classiques. A quand l'arrivée de la pub ?

C’est plus compliqué chez Bank of Poker. Chaque joueur bénéficie de trois crédits par jour pour participer à des SnG 9 joueurs ou 18 joueurs, il doit ensuite attendre le lendemain pour pouvoir rejouer, ou passer par des parties « training » qui font gagner de nouveaux crédits. Malin, puisqu’à chaque partie, vous êtes d’abord accueilli par deux publicités de 30s, puis la publicité tourne sans discontinuer à la table, avec même des interruptions de la partie comme à la télé. Les gains vont de 0.20€ à 0,92€ selon le type de SnG choisi. Un système de fidélité est aussi en place, permettant d’avoir plus de crédits quotidiens par exemple, et soi-disant des tournois réservés. Enfin des tournois sponsorisés pouvant proposer jusqu’à 5000€ de dotations sont annoncés.
Le principe est simple : des offres alléchantes et des process qui permettent de ne pas les tenir. Ainsi le fameux tournoi à 15.000 de Charliepoker pour les 100 premiers du classement est annoté de l’astérisque : « Les gains seront payés uniquement si le nombre d’inscrits est supérieur à 15.000 le 15 juin 2012 à 23h59 ». Très ambitieux ou très roublard. Chez Bank of Poker, après un mois de lancement, marqué dès le premier jour par un soft planté avant même la première distribution de cartes, des tournois à 1000€ sont annoncés à 21h00 mais avec une mention « à venir » que l’on peut sans problème imaginer ne jamais venir. En attendant, les annonceurs ont plébiscité le principe puisque l’on retrouve déjà sur les tables des marques comme CDiscount, Cofidis, ING Direct, Côte d’Or, Fortuneo … Quant au programme VIP, chaque palier nécessite de remporter la bagatelle de 370 SnG à 9 joueurs (pour rappel, trois seulement sont accessibles par jour). Quand fidélité rime avec vache à lait ...
Pourtant, il faut reconnaître que ces sites répondent à une véritable demande. Sur les sites agréés, outre les pros et les joueurs réguliers, les freeroll players sont légion. Sur Winamax, il ne faut désormais que quelques minutes pour atteindre le plafond des 5000 joueurs, parmi lesquels euls huit d’entre eux toucheront plus d’1€ de gains soit 0,16% d’entre eux. Remporter 1€ sur un SnG gratuit à 18 joueurs sur ce nouveau format de poker n’est donc pas une si mauvaise alternative.
Le plus simple est encore de vous faire votre propre idée, mais après avoir testé les deux solutions, Charliepoker est  l’application la moins mal aboutie, Bank of Poker l’offre la moins douteuse. Pas d’inquiétude pour les sites payants, au pire, des joueurs ne leur rapportant rien vont s’échapper, mais ces derniers devraient revenir rapidement  en se rendant compte que les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent.  Surtout que sans contrôle d’un organisme indépendant, l’équité du jeu et des tirages n’est finalement garantie que par l’assertion, impossible à vérifier, « 100% contrôlé par huissier » des protagonistes. Un peu léger …

mercredi 9 mai 2012

L'EVOLUTION DU MARCHE DU POKER EN LIGNE

Je décachète l’enveloppe, en extraie avec fébrilité le carton sur lequel se trouve le nom du vainqueur. L’heure est grave, le moment historique pour les deux prochains jours. A l’échelle de l’évènement.
Et le vainqueur du PowerPoint d’or du trimestre est … L’Autorité de Régulation des Jeux en Ligne !
Sans surprise, c’est une nouvelle fois l’ARJEL qui s’adjuge ce titre, à la suite de la parution le  04 Mai de sa désormais classique « Analyse trimestrielle du marché des jeux en ligne en France ». 32 pages pleines d’informations sur le joueur, son mode de jeu, ses habitudes, sa fréquence d’addiction, … Une mine d’or d’informations reprise en cœur par tous les sites d’infos poker, forums, blogs et donc désormais ici.
Sur les paris sportifs, après une année 2011 clairement en deçà des attentes des opérateurs, ces derniers retrouvent sur ce premier trimestre 2012 des raisons de se montrer optimistes. Si le nombre de comptes joueurs actifs reste presque stable (-3%), le montant des mises affiche une belle hausse de 14%, le chiffre d’affaires (Produit Brut des Jeux, PBJ) des sites progressant, lui, de 7%. Du côté des paris hippiques, l’augmentation des mises est sensiblement identique (+13%) mais le PBJ est supérieur à 20% à celui de la même période l’an dernier, avec dans cette activité en revanche, 10% de comptes actifs supplémentaires.

En ce qui concerne le poker, les tendances Cash Game et Tournois continuent à s’opposer avec des mises qui baissent à nouveau de 5% pour la première et qui à l’inverse continue sa progression de 26% pour la deuxième. Ce qui a pour impact sur le marché du poker un recul de 3% du PBJ des opérateurs. Si le niveau de comptes joueurs actifs est très légèrement supérieur au premier trimestre 2011, la variation d’une semaine sur l’autre est la plus importante qu’a connue le marché depuis son ouverture, de 345.000 début février à moins de 300.000 fin mars. Les opérateurs sont donc confrontés à une véritable problématique marketing et financière : les joueurs se détournent de l’activité la plus lucrative pour s’orienter vers les tournois : 87% des comptes joueurs actifs ont participé à un tournoi en T1 2012 contre 84% un an auparavant, mais surtout 62% ont joué en Cash Game alors qu’ils étaient 68% en 2011.

Cela rend par exemple les bonus de bienvenue sans grand intérêt puisque l’ensemble du marché est aujourd’hui positionné sur la même offre (500€), et qu’ils n’adressent pas le besoin des joueurs puisqu’inadaptés aux joueurs de tournois. La réponse commence à se faire sentir, les bonus cash dédiés aux MTT, de 5€ ou 10€ en 2011 sont passés en l’espace de trois mois à 50€ sur certaines rooms « secondaires ». La preuve donc que la limitation des bonus de bienvenu par l’ARJEL est positif pour les joueurs, les regs de Cash Game qui sont les seuls à pouvoir les décrocher préférant se contenter des rooms principales au regard de leur liquidité et programmes de fidélité/rakeback.

Au total, nous sommes 772.000 joueurs de poker actifs sur ce premier trimestre, soit plus que de parieurs sportifs et hippiques réunis.

A quoi ressemble ce joueur et quels sont ses habitudes ? D’abord, c’est un joueur qui vieillit un peu par rapport aux six derniers mois, la population 35-55 ans grossissant de 3% au détriment des 18-24 ans. Logique, puisque les joueurs ont naturellement vieilli depuis six mois, mais cela signifie que de nouveaux jeunes joueurs viennent moins en remplacement. C’est ensuite toujours très majoritairement un homme, la population féminine grandissant de 1%, ego et testostérone ont encore de beaux jours devant eux. Il n’aime pas déménager et n’a pas envie de supporter le prochain Champion de France de football puisqu’il réside toujours principalement dans le Nord, l’Ile-de-France et les Bouches-du-Rhône, ces trois régions étant néanmoins celles qui affichent les plus grosses baisses de comptes joueurs actifs en poker par rapport à T1 2011. A l’opposé, le Finistère a le vent et le chouchen en poupe (+2459 comptes).

Il joue de plus en plus en mode récréatif, 50% des joueurs (contre 48% l’an dernier) ont misé moins de 100€ sur le trimestre, et ce chiffre monte à 81% si l’on compte les joueurs ayant misé moins de 300€. Ce qui ressort, en revanche, c’est que la population de joueurs la plus touchée est celle des joueurs de Cash Game misant de 10.000€ à 30.000€ : Près de 30% de joueurs en moins ! Quant aux 2385 joueurs qui misent trimestriellement plus de 100.000€, ils sont, eux, 4% de moins. Nul besoin d’aller chercher très loin une raison à la  baisse du CG de 9% sur la période. C’est un coup dur pour les leaders du marché car en y regardant de plus près, 1% des joueurs de CG génèrent à eux seuls 59% du total des mises, si l’on prend 10% des joueurs, ce chiffre monte même à 90%. Cette baisse significative sur la population la plus active vient donc impacter directement les résultats financiers trimestriels des poids lourds du marché, alors qu’ils peinent déjà tous à rentabiliser leur activité. L’actualité anxiogène sur la fiscalisation peut-elle expliquer cette baisse d’une année sur l’autre, les gros grinders répondant aux sirènes maltaises ou autres pour retrouver le .com ? En tout cas, l’ARJEL, dans sa grande analyse, se cantonne aux chiffres et se garde bien de tirer toutes conclusions, surtout si elles sont contraires aux décisions gouvernementales.

En revanche, elle va plus loin sur des sujets hautement plus importants. Saviez-vous par exemple que le joueur en ligne, toutes activités confondues, a déposé 73€ par mois sur son compte, soit 1€ de moins que sur la même période l’an passé, mais 3€ de plus qu’au dernier trimestre 2011. Et devinez quoi ? Le joueur de poker joue plutôt le soir, beaucoup moins la nuit … Voilà, une fois que vous avez dit cela, nous sommes bien avancés. Surtout qu’elle ajoute que bien évidemment, les joueurs privilégient les dépôts par cartes bancaires pour ceux qui croiraient que le mandat-poste est toujours une option. Signalons que les cartes prépayées prennent une place de plus en plus importante dans le mode de paiement, belle ironie puisqu’une des dernières décisions de l’ARJEL (n°2012-049 du 18 avril 2012) portait sur le refus aux opérateurs de proposer eux-mêmes des systèmes de paiement à leurs clients puisque n’étant justement pas prestataires de services de paiement.

Dans les informations complémentaires disponibles dans ce rapport trimestriel, deux points importants viennent conclure cette analyse : La mobilité continue sa percée puisqu‘en un an ils sont quatre fois plus nombreux à jouer sur smartphones et tablettes. Winamax a donc eu le nez creux puisque le marché de la mobilité lui appartenait quasiment tout entier (Bwin permettant juste de monotabler en Cash Game, la belle affaire …) jusqu’à ces dernières semaines et le lancement, enfin, de l’application Pokerstars mobile. Ce pourcentage devrait donc s’accroître de manière significative au prochain trimestre. L’autre aspect que révèle ce document a trait aux investissements publicitaires des opérateurs, mais ne faisant pas de différences entre paris sportifs, hippiques et poker, difficile d’en tirer des conclusions spécifiques aux acteurs du marché du poker. Dans l’ensemble, on retient que les dépenses publicitaires ont chuté de 44% d’une année sur l’autre, et que les bonus et offres de parrainage représentent plus de la moitié de ces investissements, surtout par effet mécanique.

 soxav


mercredi 2 mai 2012

DUEL AU SOMMET WINAMAX SERIES / SCOOP POKERSTARS



Choc des titans en ce début avril avec la rencontre à distance des deux poids lourds du marché du poker en France opposant les Series III de Winamax et les SCOOP 2012 de Pokerstars (Spring Championship of Online Poker). Sur le ring, à ma droite (ne voyez là aucune allusion à la dernière interview de Patrick Bruel), 2 millions d’euros garantis pour 27 tournois et 3.300€ de droits d’entrée sur une semaine. A ma gauche, son challenger et ancien champion en titre, accusant à la pesée 3.5 millions d’euros garantis pour 34 tournois sur deux semaines et 3.645€ de droits d’entrée. Ces deux semaines de combat ont-elles vu la victoire aux points ou par KO d’un des protagonistes ?
Sans surprise, après la semaine des Winamax Series, le camp W affiche un grand sourire arguant de « dotations énormes » et d’une « affluence maximale ». « Même pas mal », doit-on se dire une semaine plus tard dans le camp Pokerstars à l’issue de tournois probablement qualifiés de « prizepools gigantesques » et autres « fréquentations stratosphériques » . Oublions les échanges d’épithètes aussi évidents que prévisibles et subjectifs pour étudier en détail les véritables chiffres de cette confrontation.
La fréquentation démontre un vrai engouement pour les deux évènements. Avec près de 95.000 joueurs sur l’ensemble de ses tournois, Pokerstars devance de loin Winamax qui n’en affiche « que » 62.000. Rapporté au nombre de tournois des deux rooms, les tournois de PS ont attiré en moyenne 21% de joueurs en plus (2780 vs 2290) pour des prizepools garantis 75% supérieurs au départ. Winamax a donc mieux rentabilisé le risk reward mais s’est fait largement distancer en volume par Pokerstars.
 Du côté de Winamax, on pourra émettre des regrets sur cette garantie, dépassé de 25% au total malgré trois events (#19,20 et 24) dont le prizepool n’est pas totalement couvert par les droits d’entrées des joueurs. A l’inverse, Pokerstars ne connaît pas le phénomène, toutes les garanties ayant été atteintes, ce seront finalement 4.7 millions d’euros qui auront été partagés entre les joueurs. Si certains sont inquiets de la santé financière des deux opérateurs à l’issue des évènements, qu’ils se rassurent. Winamax a engrangé 220.000€ de rake brut, Pokerstars 355.000€. Même après la ponction de l’état d’environ un tiers, ces séries de tournois offrent un ROI plus qu’intéressant avec une moyenne de 8.150€ de commissions par event Winamax Series, et de 10.440€ par tournoi SCOOP.
 Si le Hold’em a bien entendu connu les faveurs de ces tournois, les opérateurs n’ont pas négligé la variante Pot Limit Omaha avec sept events dans ce format. Avec des prizepools garantis à peine dépassés, voire non atteint sur l’event  1, Winamax a paré au plus précis, Pokerstars explosant ses garantis de 35% en moyenne. Vrai succès mais aussi un certain manque d’ambition de ce dernier. Avec un 100€ garanti à seulement 20K contre un 50€ à 15K chez son concurrent, Pokerstars a limité les risques pour le format très particulier qu’est le PLO HU. En 6-max, le WS19 et le SCOOP 3B proposait une garantie similaire à 30.000€. Avec un buy-in à 50€, Winamax a enregistré une fréquentation 3,5 fois moins forte que le tournoi à 20€ de PS, et attiré à peine 30% de joueurs en plus que la version à 200€ dotée du double de prizepool. En choisissant des limites élevées pour cette variante, Winamax n’a pu séduire sa clientèle plus récréative et « hold’em addicted ».
 Le Hold’em Shorthanded a sans surprise fait le plein, Winamax privilégiant cette formule pour un tiers des tournois organisés contre un MTT sur cinq côté Pokerstars. Ce dernier est encore une fois largement devant en termes de fréquentation sur les middle Buy-in, avec un écart moins conséquent qu’en Omaha : seulement 36% de joueurs en plus pour PS sur les tournois à 20€ (4429j sur le SCOOP 12B contre 3257j lors du WS #24). Sur les limites supérieures, le choix de Winamax est payant avec plus d’évènements et des prizepools garantis plus ambitieux : pour 100.000€ assurés aux joueurs, Winamax proposait un tournoi à 100€ alors que son homologue jouait la sécurité avec un tournoi à 200€. Choix payant puisque le nombre de participants explose, et le prizepool final n’accuse qu’un retrait de 11% sur PS.
Le constat est le même en 4max. Winamax a opté pour un Buy-in intermédiaire à 50€ dans cette variante garantissant 60.000€ de prizepool alors que Pokerstars privilégiait une entrée à 15€/150€ avec une version High dotée de « seulement » 80.000€. Résultat : en payant leurs entrée trois fois moins cher, les joueurs se sont finalement partagés deux fois moins d’argent (71.5K€ contre 136.5K€).
 Les modes Rebuy sont en revanche clairement en faveur de Pokerstars. Sur les tournois à 10€, la fréquentation y est de 90% supérieure au tournoi équivalent (version Full Ring) de Winamax. Au buy-in 20€ c’est même six fois plus de joueurs qui ont pris part à la compétition sur Pokerstars générant un prizepool deux fois plus important. Enfin le 100€ 1R1A regroupe quasiment autant de joueurs que le 10€ du leader du marché. Au total, les tournois rebuy en NLHE auront généré 880.000€ de prizepool, soit sept fois plus que les deux seuls tournois des Series. En revanche, le choix du mode Re-entry pour quatre évènements permet à Winamax de compenser en partie cet imposant écart, même si un 100€ Re-entry Winamax ne réalise que 75% de la fréquentation d’un 200€ Rebuy Winamax. Il s’agit clairement d’un axe de progrès pour la prochaine édition de Series afin d’envisager des tournois à prizepool plus importants.
 Restent les modes exotiques qui connaissent leurs heures de gloire à l’occasion d’évènements de ce type. Pokerstars a dédié un event à la formule KnockOut, Winamax lui préférant une formule Bounty sur sa palanquée de people, sportifs, pros. Légèrement différent donc, la version PS a attiré 12% de joueurs en plus. Avec plus de 1500 joueurs à 100€, le KnockOut est définitivement plus rentable, d’autant plus que les bounties y sont financés par les buy-in. En mode Shootout, le géant américain se permet de capper le nombre d’entrées à 1000 joueurs, chiffre atteint assez facilement sur l’event Low. Au même buy-in l’event des Series attire à peine 60%  de ce nombre (632 joueurs). C’est d’ailleurs le seul event dont l’overlay ne sera pas couvert par les joueurs pour environ 20% de la garantie.
 Les deux opérateurs ont achevé leur offre de tournois exceptionnels par un event au buy-in de 1000€, mais avec un prizepool garanti pharaonique de 1 million d’euros quand son concurrent se contentait d’assurer 150.000€ aux joueurs, Pokerstars a littéralement enterré Winamax. Fort de 1255 participants, c’est presque 1,2 millions d’euros qui seront partagés entre les joueurs. Pour vous donner un ordre d’idée, le vainqueur du HighRoller Winamax remporte autant que le … 6e du Main Event des SCOOP, le vainqueur de celui-ci s’octroyant la bagatelle de 202.682€. Espérons qu’il soit français pour nos amis des impôts …
S’il est un domaine dans lequel Winamax excelle bien plus que son concurrent, c’est celui de l’originalité et de la créativité. En proposant un tournoi « Bounty » avec ses peoples et sportifs, en assurant au vainqueur du deuxième Sunday Surprise un accès à trois évènements des championnats du monde ou au vainqueur du premier un accès illimité  aux 27 tournois, les Winamax Series ont conféré une image plus fun à leurs tournois, avec en point d’orgue la victoire dans le premier event d’un certain _LePecheur_ … un 1er avril. Nice one !
 Victoire au point pour Pokerstars donc qui démontre sa capacité à fédérer le plus grand nombre de joueurs, dont des étrangers, pour des prizepools jusqu’à plus d’un million d’euros, mais cela reste très close. Qui aurait cru à de tels montants en juin 2010 lors de la régulation et du cloisonnement du marché français. Winamax ne pourra donc pas se reposer sur ses lauriers de chipleader du marché. Surtout que derrière, la relève arrive et compte bien se faire une place parmi l’élite. Et si finalement, les vrais vainqueurs n’étaient autres que les joueurs …